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Plan urbain de mobilité (PUM) : le viaduc autoroutier au-dessus de Tilff est à l’ordre du jour !

C’est très clair depuis quelques semaines : les défenseurs du béton et de la bagnole, en vue des élections régionales de mai 2019, lancent actuellement toutes leurs forces dans une (dernière ?) bataille en faveur de la construction de l’autoroute Cerexhe-Heuseux/Beaufays (CHB), un projet de contournement de l’agglomération par l’Est particulièrement peu pertinent sur le plan de la mobilité (sa propre étude d’incidences démontre qu’il ne résoudra pas les problèmes en réponse auxquels il est défendu) et particulièrement peu compatible avec l’urgence climatique, notamment par le coup de boost qu’il donnerait inévitablement à la périurbanisation de l’Est de l’agglo.

Le Plan urbain de mobilité (PUM), dont l’enquête publique est actuellement en cours, est le fer de lance de cette offensive, visant à produire une apparence de consensus politique en vue de la prochaine négociation gouvernementale — les 24 conseils communaux de l’arrondissement seront en effet amenés à se prononcer très rapidement sur ce « PUM », avec pour seule option a priori d’accepter ou de refuser en bloc le document (quoiqu’il serait intéressant de proposer une approbation conditionnée au retrait de certaines propositions).

Parmi les nombreuses conséquences de ce « chaînon manquant », l’une des plus préoccupantes est qu’il va inévitablement générer d’autres chaînons manquants, que, sous prétexte de résoudre la tension routière, il va créer de nouveaux points de tension, auxquelles la seule réponse sera la construction de nouveaux « chaînons manquants », dans une fuite en avant particulièrement mortifère, non seulement sur le plan de l’environnement, de la santé publique, mais aussi sur le plan budgétaire.

En décembre 2007, alors porte-parole de la coalition associative contre l’autoroute CHB, j’avais publié le schéma suivant, qui montre le réseau existant (en orange), le tracé du CHB (en rouge) et l’inévitable tronçon suivant (en bleu).

J’écrivais à l’époque : « [...] l’hypothétique bouclage du ’ring liégeois’ — qui est au programme — passera par un viaduc au-dessus de Tilff, pour relier Beaufays à Boncelles (que la pression automobile induite par CHB dans la vallée de l’Ourthe rendra peu ou prou inévitable) et par la mise en autoroute du tronçon Boncelles-Ougrée-Seraing (en bleu). Le voilà, le vrai projet de ’ring liégois’. Que ses promoteurs aient le courage d’assumer publiquement leur ’vision d’avenir’ pour Liège. Qu’ils aient la décence d’expliquer comment on financera ces travaux supplémentaires. »

Dans les documents du PUM, qui sont actuellement à l’enquête publique (à la page 164 du Rapport sur les Incidences Environnementales — RIE), on trouve la confirmation de cette annonce. Un schéma (tiré du Plan communal de mobilité liégeois de 1999) est en effet exhumé et, repris dans le PUM — un document qui doit être approuvé par le gouvernement wallon —, il prend un statut prescriptif qu’il n’avait pas dans un document communal.

Concrètement, cela signifie que la construction de l’autoroute CHB, si elle devait se concrétiser, entrainerait probablement la construction d’un nouveau tronçon autoroutier, entre Beaufays et Boncelles — et que tout le corps politique liégeois est appelé à ratifier cette vision. Dès lors que la dénivelée entre l’Ourthe à Tilff et Boncelles et d’environ 200 m, la seule façon de faire est de construire un viaduc de grande hauteur au-dessus de Tilff. Le hameau d’Avister, les bois de Nomont et de Famelette sont directement menacés.

Ajoutons que ce scénario n’est pas dépourvu de contraintes considérables pour Seraing et son Master Plan : alors que la Cité du fer est actuellement engagée dans un Master plan visant à une requalification urbaine de la vallée industrielle, le passage des Quais du Halage et du Bac au gabarit autoroutier (à moins que, pire encore, ce soient les quais de la Rive droite qui soient concernés) et l’arrivée d’un important trafic de transit compromettrait cette indispensable ambition.

De surcroît, l’A604, évoquée pour permettre à ce futur « ring liégeois » de rejoindre le plateau hesbignon donne directement dans la zone aéroportuaire, dont la saturation suscite d’ores et déjà, par ailleurs, un autre projet de contournement Nord. En sorte qu’un nouveau « chainon manquant » pourrait assez rapidement sortir des cartons, visant à rejoindre plutôt la N677, à Flémalle, en contournant Seraing par le Sud.

Alors que des dizaines de milliers de personnes, je l’espère, manifesteront ce dimanche pour exiger en engagement beaucoup plus fort de la part de nos gouvernements dans la lutte contre le changement climatique, il est important de comprendre que ce combat pour le climat se joue notamment ici et maintenant, très concrètement, dans des débats comme celui-ci, dans le choix à poser entre la poursuite indéfinie d’un développement routier ruineux et nuisible ou une priorité à mettre enfin vers les alternatives, notamment ferroviaires.