Certains s’en sont (gentiment) moqués : je suis, depuis que les premières infos sont sorties, mi-janvier, assez préoccupé par le coronavirus « covid 19 ». Ses caractéristiques — en particulier une durée d’incubation qui peut être très longue et le fait que des porteurs asymptomatiques (donc très difficilement détectables) peuvent être contaminants — en font pour nous, humains, un prédateur redoutable.
Pour autant, même si la pandémie devait se généraliser, il faut dire et rappeler que les sociétés humaines ne courent pas un danger existentiel. Dans le pire des cas (dont nous sommes encore loin, soulignons-le), des (dizaines de) millions de personnes mourront dans le monde, les systèmes de santé seront saturés pendant des mois et l’économie mondiale connaîtra une crise majeure. Mais pour la grande majorité d’entre nous, le virus ressemblera à une grippe. Nos systèmes immunitaires s’adapteront. Un vaccin sera trouvé et produit en quantité suffisante. Et la vie continuera.
Ce qui est frappant, cependant, c’est le manque d’anticipation face à la menace. Les gouvernements comme les individus attendent, beaucoup trop me semble-t-il, d’être placés au pied du mur avant de prendre une attitude résolue de réduction des risques.
Le gouvernement chinois a ainsi attendu, pendant un mois et demi, que la situation soit devenue gravissime à Wuhan avant de sonner l’alerte et de confiner la zone. Les autorités japonaises ont traité avec une désinvolture criminelle la situation du bateau de croisière Diamond Princess, avant de se trouver confrontées à une situation très compliquée en de nombreux points de leur territoire. En Italie, un retard de diagnostic a, semble-t-il, permis au virus de se propager. En France, Macron poursuit imperturbablement une offensive sans précédent contre l’hôpital public, qui craque de partout selon de multiples témoignages, alors même qu’il apparaît déjà que la fragilisation de cet outil essentiel va poser de graves problèmes pour affronter l’épidémie si elle se propage, notamment, en Île-de-France. Quant aux autorités belges, elles hésitent, parait-il, à commander les protections individuelles nécessaires en cas d’épidémie.
Par contre, une fois que la crise est déclarée, le recours aux mesures les plus contraignantes ne fait même plus débat — ce qui démontre certes la capacité à prendre de telles mesures mais pose quand même des questions sérieuses, notamment au plan des libertés publiques.
Le parallèle est frappant entre cette situation et celle dans laquelle nous place le changement climatique. Sauf que ce dernier représente, lui, une menace très nettement plus grave pour la persistance à long terme des sociétés humaines. Mais voilà : cette menace-là, elle est étalée dans le temps et si elle produit déjà des effets très observables (tiens, au cours des douze dernières heures, il y avait encore une cinquantaine de feux de forêt en cours en Australie, cf. image), nous pensons qu’elle ne nous touchera que dans des dizaines d’années (les Australiens aussi pensaient cela il y a trois mois).
Et donc rien n’y fait : tant que nous ne nous sentons pas directement, immédiatement, en danger, nous reportons encore et encore les décisions qui pourraient nous protéger. Nous savons qu’il faudrait faire décroître rapidement nos émissions de gaz à effet de serre et nous savons comment le faire. Mais nous attendons...
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