Comme vous le savez sans doute, le Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation (CDLD) permet aux citoyens d’une commune d’interpeller le Conseil communal. La Conseil communal de Liège a inscrit depuis peu cette possibilité dans son règlement d’ordre intérieur. Voici donc les extraits pertinents de ces deux textes, un petit mode d’emploi pour faciliter la formulation d’une interpellation dans les formes prescrites.
Extrait du CDLD (Art. L1122-14 ) :
§2. Les habitants de la commune peuvent interpeller directement le collège en séance publique du conseil communal.
Sont des habitants au sens du présent article, toute personne physique de dix-huit ans accomplis inscrite au registre de la population de la commune depuis six mois au moins, ainsi que toute personne morale dont le siège social ou d’exploitation est localisé sur le territoire de la commune et qui est représentée par une personne physique de dix-huit ans accomplis.
§3. Le texte intégral de l’interpellation proposée est adressé par écrit au collège communal.
Pour être recevable, l’interpellation remplit les conditions suivantes :
1° être introduite par une seule personne ;
2° être formulée sous forme de question et ne pas conduire à une intervention orale de plus de dix minutes ;
3° porter :
a) sur un objet relevant de la compétence de décision du collège ou du conseil communal ;
b) sur un objet relevant de la compétence d’avis du collège ou du conseil communal dans la mesure où cette compétence a un objet qui concerne le territoire communal ;
4° être à portée générale ;
5° ne pas être contraire aux libertés et aux droits fondamentaux ;
6° ne pas porter sur une question de personne ;
7° ne pas constituer des demandes d’ordre statistique ;
8° ne pas constituer des demandes de documentation ;
9° ne pas avoir pour unique objet de recueillir des consultations d’ordre juridique.
Le collège communal décide de la recevabilité de l’interpellation. La décision d’irrecevabilité est spécialement motivée en séance du conseil communal.
§4. L’interpellant expose sa question en séance publique à l’invitation du président du conseil dans le respect des règles organisant la prise de parole au sein de l’assemblée et dans le temps imparti au §3, 2°.
Le collège communal répond aux interpellations.
L’interpellant dispose de deux minutes pour répliquer à la réponse, avant la clôture définitive du point de l’ordre du jour.
Les interpellations sont transcrites dans le procès-verbal de la séance du conseil communal. Il est publié sur le site internet de la commune.
§5. Une commission communale des requêtes peut être mise en place pour donner suite aux interpellations introduites conformément à l’article L1122-34, §1er.
§6. Le règlement d’ordre intérieur fixe les modalités d’application du présent article – Décret du 26 avril 2012, art. 7.
Extrait du Règlement d’ordre intérieur du Conseil communal (encore fort perfectible à mes yeux, et des amendements ont été rentrés en ce sens, mais d’ores et déjà d’application) :
Art. 33. Dans le respect de l’article L1122-14 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, les habitants de la commune peuvent déposer leur demande d’interpellation auprès du Collège communal. Ces interpellations doivent parvenir par écrit au Secrétariat communal, au plus tard 15 jours ouvrables avant la date fixée pour la tenue de la séance du Conseil.
Le Collège communal, après le temps consacré à l’examen de leur recevabilité et de la réponse à donner, est chargé d’inviter l’interpellant à se présenter à la séance du Conseil dont la date lui sera communiquée.
Art. 34. Un habitant de la commune ne peut déposer plus d’une interpellation dans un délai de six mois à compter de la réception par le Collège communal, de sa première interpellation. Le sujet d’une interpellation ne peut faire l’objet d’une nouvelle interpellation qu’après l’écoulement d’un délai de six mois à compter de la réception, par le Collège communal, de la première interpellation.
Art. 35. Si après examen, le Collège estime que l’interpellation déposée par un habitant de la commune ne revêt pas le caractère général prescrit par l’article L1122-14, § 3, 4e du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, il peut inviter l’interpellant à se présenter devant la Commission compétente pour y être entendu.
Art. 36. Dans tous les cas, le nombre d’interpellations par les habitants de la commune est limité à trois par séance du Conseil.
On suggérera évidemment, même si ce n’est pas précisé, d’envoyer le courrier par recommandé avec accusé de réception, qui permettra de prouver la date de dépôt de la requête.
On le voit, les embûches sont nombreuses (aucun délai n’est prévu, par exemple, pour l’examen de la recevabilité par le Collège) et le règlement est loin d’être formulés de manière limpide sur certains points essentiels. Quant aux dates de réunion du Conseil communal, elles ne sont à ce jour pas annoncées suffisamment tôt à l’avance sur le site de la Ville (mais il suffit de poser la question pour avoir l’info). Il n’empêche : l’interpellation citoyenne fait à présent partie des possibilités ouvertes aux citoyens de la Ville (voir aussi les infos à ce propos sur le site de la Ville ).
Pour terminer, je signalerai – ce n’est pas un secret – que cette incursion de la « démocratie participative » (avec toutes les réserves que suppose cette expression) dans un cénacle d’élus laisse bon nombre de ceux-ci perplexes ou inquiets, à la fois pour des raisons pratiques (Quel impact cela aura-t-il sur la tenue des Conseils, qui sont déjà forts longs ?), sociologiques (N’y aura-t-il pas un biais fort entre ceux qui sauront utiliser cette possibilité et la population moyenne ?) voire existentielles (Quel est le sens d’être élu si tout citoyen peut s’exprimer au Conseil ?).
À mon sens, dès lors, s’il importe évidemment de faire usage de ce droit (sans quoi il tombera en désuétude), cet usage doit être bien réfléchi : disposer de la parole pendant dix minutes dans le Conseil communal, c’est une opportunité à ne pas gaspiller. J’aimerais que celles et ceux qui s’en saisiront aient à cœur de démontrer, par la pertinence de leurs questions, par l’information qu’il auront recueillie à l’appui de celles-ci, par leur souci de l’intérêt collectif, que le législateur a bien fait d’ouvrir cette possibilité.
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