Il n’y a juste rien qui va dans le sinistre vaudeville que nous livrent depuis bien trop longtemps les partis de la majorité fédérale au sujet de la Palestine — et qui a connu ce jour un énième non-événement avec un kern décidant… de ne rien décider, sans que les trois partis qui menaçaient de faire tomber le gouvernement en cas d’absence d’accord ne mettent leur menace à exécution.
D’abord et avant tout, il y a une urgence humanitaire, morale, vitale, une urgence absolue : faire cesser le massacre en cours et apporter immédiatement de l’aide humanitaire à la population de Gaza. Israël est en train de tuer à petit feu une population de 2 millions de personnes, par les bombes, par la faim, par la privation de tout : Israël est en train de commettre un génocide. On ignore combien de personnes sont déjà mortes, mais il est certain que ce nombre excède largement le décompte des victimes directes répertoriées, actuellement établi à 53 000 personnes, dont 83% de civils, tandis que la famine est officiellement déclarée. L’indifférence n’est pas possible face à un génocide. On lutte pour le faire cesser toutes affaires cessantes. Ou l’on s’en rend complice.
Le débat sur la reconnaissance de l’Etat palestinien, tout important qu’il soit, n’est donc pas la question la plus urgente.
Le ministre Prévot a — enfin — déposé sur la table du gouvernement une note qui propose des sanctions contre Israël. Mais ces propositions sont extrêmement tièdes, presque ridicules vu la gravité de la situation.
Détaillons-en les principales.
Alors que c’est tout l’appareil d’Etat israélien qui est organise le génocide (sans majorité à la Knesset, ce gouvernement tomberait et le massacre cesserait), seuls deux ministres (les fous furieux Itamar Ben-Gvir et Bezalel Smotrich) sont visés par Prévot. Comment le comprendre ?
De même, seuls les produits et services provenant des colonies, seuls les colons sont visés par les restrictions à l’importation ou les refus d’octroi de visas. C’est un peu comme si on avait limité les sanctions visant la Russie aux seuls productions venant des territoires ukrainiens occupés et aux seuls Russes participant à l’occupation de ces territoires. Ça n’a juste aucun sens.
La proposition de Maxime Prévot contient aussi des éléments qui devraient être en vigueur depuis bien longtemps. Poursuivre les Belges qui participent aux crimes contre l’humanité, par exemple, devrait être une évidence, la simple et mécanique application de la loi. Doit-on comprendre qu’il y a besoin d’un accord politique pour cela ? Faut-il donc comprendre que ces poursuites ne sont pas diligentées à l’heure actuelle ? On en frémit.
De même, des armes rendant possible le massacre continuent à transiter par la Belgique, notamment au Port d’Anvers et à Liège Airport, voire à être exportées par des entreprises belges. Les ministres Prévot et Crucke ont rédigé un projet d’arrêté royal pour faire cesser ces exportations : qu’attend-on pour l’adopter ?
Ou encore : il est question de refuser le survol de notre territoire par les vols officiels israéliens. Là encore, c’est insuffisant : un mandat d’arrêt international vise différents responsables du génocide, en particulier le premier ministre Netanyahou. La Belgique étant partie au Statut de Rome, ce mandat d’arrêt devrait être appliqué sans autre discussion.
Et bien sûr, dans l’ordre du jour de nos éminences ministérielles, il ne semble pas du tout être question de la colonisation qui se poursuit à marche forcée en Cisjordanie, morcelant ce territoire au point de rendre non viable un hypothétique Etat palestinien qui devrait s’établir sur les lambeaux qui en restent. Ni des infinies exactions contre la population cisjordanienne, des innombrables meurtres impunis commis par les colons, de l’accaparement de ressources hydriques et autres, etc. Mais la reconnaissance de l’Etat palestinien n’a de sens que si on exige en même temps le retrait de tous les colons et le respect des frontières définies par l’ONU, que si l’on donne à cet Etat les moyens d’exister : pourquoi M. Prévot n’en souffle-t-il mot ?
Par ces atermoiements infinis, par la mollesse désespérante de son positionnement, le gouvernement belge est en train de se déshonorer et donc de nous déshonorer. Il est en train de faire de la Belgique une complice, par passivité, du génocide. C’est insupportable.
Les responsables de cette situation sont parfaitement connus : deux partis — le MR et la NVA — font absolument tout, depuis des mois et des mois, pour différer, empêcher, amenuiser, anéantir toute réaction possible de la Belgique face au génocide.
J’ai lu les positions de ces deux partis, j’ai tenté d’en comprendre la rationalité. Je n’ai trouvé aucune explication défendable. Même avec la plus grande charité interprétative, je ne vois comment ces positions pourraient être compatibles avec les principes fondamentaux qui devraient guider tout démocrate dans une situation comme celle-ci : l’égale dignité de chaque être humain, le respect du droit international, etc.
Que peut-on donc en conclure, sinon que ces partis ont quitté le consensus démocratique ?
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