Courrier aux chefs des services de dentisterie publics de Liège

Liège, le 15 juillet 2025

À l’attention de :

M. Aurélien PTAK
Chef de service de dentisterie
CHR - site du Laveu
Rue des Wallons 72
4000 Liège

Mme Sabine GEERTS
Cheffe de service de dentisterie
CHU Sart Tilman
Rue de l’hôpital 1
4000 Liège

Monsieur et Madame les chefs de service,

Je m’adresse à vous après avoir observé personnellement à quel point il est difficile d’obtenir des soins dentaires dans notre ville et après avoir recueilli de nombreux témoignages qui confirment ce constat. Chaque matin, de nombreuses personnes se lèvent dès potron minet pour aller faire la file — laquelle se forme avant 5 heures du matin — aux urgences dentaires. Seule une petite partie d’entre elles seront admises, après une longue attente dans de mauvaises conditions, les autres étant renvoyées chez elles, avec pour seule consigne : « revenez demain ». Mais demain, il se passera la même chose.

Vos services respectifs ne prennent plus de nouveaux patients, alors qu’il est devenu extrêmement difficile de trouver des soins dentaires de qualité à des prix et délais raisonnables dans le privé.

Je me permets dès lors de vous poser la question, sans détour : vous considérez-vous encore comme un service public ? Dans l’affirmative, comment envisagez-vous le principe d’universalité qui est consubstantiel de cette notion ?

Pourquoi, de façon minimale, ne veillez-vous déjà pas à garantir de meilleures conditions d’accueil — d’attente — à ces patients ? Au Brüll, en particulier, l’attente se fait à l’extérieur, par tous les temps, sans le moindre abri, sans même la possibilité de s’asseoir, ce qui est en soi excluant pour toute une partie du public.

Pourquoi ne prévoyez-vous d’autres horaires, de façon à tenir compte de la diversité des situations que vivent vos patients ? Je pense par exemple ici aux parents solos, pour qui se rendre aux urgences, sans aucune garantie d’être pris, à l’heure où vous exigez d’eux qu’ils se déplacent, représente de considérables complications.

Pourquoi, si les urgences médicales parviennent — et fort heureusement — à assurer un service qui reste accessible à toutes & tous, les urgences dentaires ne pourraient-elles pas faire de même ?

Pourquoi les gens qui ont passé plusieurs heures à attendre en vain ne reçoivent-elles pas une priorité pour le lendemain ?

Je vous adresse ces questions empli d’inquiétude sur les conséquences de cette situation en matière de santé publique. Je crains que tout cela ne se traduise par une dégradation d’ensemble de la santé dentaire de nos concitoyennes et concitoyens, particulièrement pour les moins nantis. Et que cela alimente, un peu plus, un sentiment d’abandon, de déclassement, un ressentiment que vous auriez, je pense, grand tort de négliger.

Je ne doute pas que vous me répondrez pénurie, mais cette pénurie a été voulue et organisée par les instances représentatives de votre profession, lorsqu’elles ont exigé l’instauration d’un numerus clausus sur les études de dentisterie, dont on mesure désormais pleinement les dégâts. De ce fait, un devoir moral de garantir l’accès aux soins me semble peser collectivement, désormais, sur les dentistes.

Devons-nous réclamer que l’autorité publique en vienne à réquisitionner les dentistes afin d’assurer des soins à toutes & tous ?

En l’attente de vous lire, je vous adresse, Monsieur et Madame les chefs de service, mes salutations respectueuses.

François Schreuer
Conseiller communal de Liège