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Interpellation

Pour des « thermomètres de la pollution » sur les places publiques liégeoises

Conseil communal du 22 novembre 2016. Interpellation au Collège communal.

Monsieur le bourgmestre,

Les effets de la pollution de l’air sur la santé humaine ne sont plus à démontrer. Des rapports alarmants sur le sujet, issus d’autorités scientifiques et internationales incontestables — comme l’Organisation mondiale de la santé, l’Agence européenne de l’environnement ou le « Environmental Performance Index » des universités de Yale et de Columbia —, se sont multipliés. Selon ces sources, 12.000 morts annuels seraient à déplorer en Belgique du fait de la pollution de l’air, principalement situés dans les grandes villes — à quoi il faut un ajouter un impact négatif global sur la santé de toutes et tous, des maladies chroniques liées à cette nuisance, etc.

Il est donc très probable que plusieurs centaines de citoyens de notre ville perdent chaque année la vie de manière prématurée en raison de pathologies consécutives à la pollution de l’air. Et c’est la santé de l’ensemble des Liégeois qui est touchée par ce phénomène. Cette situation particulièrement inquiétante ne suscite cependant pas, de la part des pouvoirs publics, la réaction que l’on serait en droit d’attendre, à la hauteur de cet enjeu sanitaire majeur.

Une des raisons de cette relative inaction se trouve sans doute dans la difficulté que nous rencontrons toutes et tous à prendre l’exacte mesure du problème : la pollution de l’air est un phénomène multiforme, qui se décline à des échelles très différentes et concerne au moins une demi-douzaine de polluants différents (dont certains commencent seulement à être pris en compte et ne sont pas encore mesurés de façon systématique, comme le Black carbon, sous-catégorie des PM 2,5 dont les effets sont pourtant particulièrement délétères). Comme l’a récemment signalé l’ISSEP, la pollution peut localement varier de façon fort importante. Les abords des écoles sont, par exemple, très exposés aux heures où les parents déposent et reprennent leurs enfants. Par ailleurs, certains polluants circulent à l’échelle planétaire.

Pour faire face à la diversité de cette menace, le réseau « Céline » ne compte pourtant à ce jour que 7 stations de mesure dans l’agglomération (dont 4 sur le territoire communal liégeois), dont la localisation est loin de permettre une mesure fine du phénomène.

Pour la Coopérative politique VEGA, il est donc nécessaire de compléter les mesures disponibles par plusieurs dizaines (sinon centaines) de stations de mesure supplémentaire. Différentes expériences menées à l’étranger (notamment les « Citoyens capteurs » français) montrent que le coût des capteurs permettant de jouer ce rôle est aujourd’hui devenu accessible (de l’ordre de quelques centaines d’euros à la pièce). Les données ainsi recueillies peuvent être rendues disponibles en temps réel sur le net. Le déploiement de ces capteurs pourrait être envisagé en collaboration avec un réseau de citoyens mobilisés sur le sujet, comme cela se fait désormais dans plusieurs villes d’Europe, sous la supervision scientifique de l’ISSEP ou de l’Université.

Au-delà du déploiement de ce réseau de mesure, il nous semble aussi et surtout nécessaire d’organiser l’information des citoyens sur la pollution de l’air présente dans la ville, non plus uniquement à travers des interfaces web que seules les personnes qui se savent directement concernées vont consulter (les asthmatiques, par exemple) mais à travers des panneaux numériques disposés dans la ville, que chaque personne qui fréquente la ville croiserait quotidiennement.

Ces « thermomètres de la pollution » permettraient de rendre visible un phénomène qui, par nature, est difficilement détectable. Il permettrait à chacun de nous d’adapter spontanément son comportement en fonction de la situation : éviter des efforts physiques trop intenses, opter pour le transport public, différer ou renoncer à un déplacement automobile facultatif ou superflu,… À l’heure où les autorités publiques évoquent si volontiers les « smart cities », il y aurait ici une application intéressante de ce concept, susceptible d’augmenter notre capacité collective à comprendre la menace à laquelle nous faisons face et à prendre les décisions adéquates pour y répondre.

Nous vous demandons donc de prévoir, dans le prochain budget, une première ligne budgétaire de 100.000 EUR destinée à financer un premier lot de capteurs ainsi que l’installation de plusieurs « thermomètres de la pollution » sur les principales places publiques de la Ville.

Je vous remercie, Monsieur le bourgmestre, pour l’attention que vous aurez réservée à la présente et pour les réponses que vous lui apporterez.

François Schreuer
Conseiller communal