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La retraite par répartition, une dette ? Le malicieux argument de Benoit Drèze

Lu ce matin dans la newsletter du député CDH Benoit Drèze (pourtant souvent présenté comme représentant la « gauche » de ce parti), ce virulent plaidoyer contre la retraite par répartition :

« […] nous avons un système de pension par répartition (les pensions ne sont pas couvertes par des réserves mais par les cotisations versées aujourd’hui). Selon l’économiste Bruno COLMANT, cette « dette pension » correspond à 4 fois le PIB, ce qui est considérable. On pourrait aussi évoquer la dette écologique générée par les pays développés (surexploitation des ressources naturelles, dégradation des sols, pollution des océans, densité de CO2 dans l’atmosphère, etc.). Face à toutes ces formes de dettes, pour préserver les générations futures, une seule option s’impose : prendre résolument le chemin du désendettement, à tous les étages… »

Le système de retraite par répartition est pourtant, de très loin, à la fois le plus juste et le plus solide, comme l’histoire l’a démontré. L’autre logique, celle qui est défendue par les néo-libéraux depuis des décennies (au rang desquels se range manifestement M. Drèze), consiste à thésauriser les cotisations et à confier celles-ci aux marchés financiers. Cette approche méconnait une réalité fondamentale : l’argent n’est qu’un médiateur social, un droit de tirage sur le travail vivant. Que le travail disparaisse et l’argent thésaurisé par les retraités soi-disant « désendettés » ne vaudra tout simplement plus rien.

Là où la retraite par répartition organise l’affectation de la richesse présente, la retraite par capitalisation instaure un régime politique de la rente, où une gigantesque pression sociale s’organise pour que l’argent garde à tout prix sa valeur. C’est cette logique qui pousse à pressurer autant que possible le marché du travail pour obtenir une rentabilité élevée du capital. C’est aussi cette logique qui a mené, contre l’évidence économique, à refuser d’abolir la dette grecque alors qu’il y allait de l’intérêt bien compris de tous les Européens.

Bref, en présentant malicieusement la retraite par répartition comme une « dette », les néo-libéraux nous poussent précisément vers un monde où les logiques de la dette étouffent les peuples. Il fallait oser. L’Europe dans laquelle nous vivons — où la banque centrale a pour mission première d’éviter l’inflation et non de protéger l’emploi ou le climat — en est l’incarnation assez parfaite.